vendredi 24 décembre 2010

De l'art de vivre dangereusement en émettant une opinion sur tel ou tel bien

Je reprends l'analyse d'un ami qui me semble judicieuse.

Savez pourquoi les critiques sont si appréciés dans leur travail, qu'il s'agisse de théâtre, de voitures, de vin ou de restaurants? Parce qu'ils réduisent le risque.

Acheter un bien c'est risqué. Nos moyens étant pas illimités, y'a toujours des chances de se tromper. C'est ce qu'on nomme le coût d'opportunité. Parce que si j'achète un Pétru (on dit un pétru, des pétrus), je rennonce à 27 caisses de fuzion. Ça c'est du coût d'oportunité musclé.

Se tromper ça peut être:

-J'aime pas le vin que j'ai acheté, c'est catastrophique, j'ai "perdu" 14,25$

-Le vin est moins bons que dans le temps, c'est terrible, j'ai perdu tout dignité en amenant ça au party de noël. C'en est fini de mon image de connaisseur wine snob.

-L'accord met et vin est raté, j'aurais du opter pour le merlot maison nicolas plutôt que pour le cabernet, c'en est trop, adieu monde cruel.

Donc, vous voyez bien, c'est risqué acheter du vin. Et les critiques, en se prononcant sur la qualité d'un bien, contribuent à réduire le risque. En disant que le vin "possède une ossature pointue et découpée" (journal voir il y a quelques années) le critique permet au lecteur moyen de reconnaître quelque chose qu'il aime (ou pas) dans un vin, à savoir: une ossature pointue et découpée.

Ça me semble évident. Je suis d'ailleurs très amateur d'ossatures pointue et découpée. C'est la moinde des choses pour un homme de goût.

À mon avis, la meilleure critique tentera de décrire le vin de la façon la plus objective possible. Après coup, ça permet de se reconnaître ou non dans la description, et d'investir ses deniers durement acquis sur le bien en question, ou pas. En même temps, soyons honnête, ce qu'on cherche réellement en achetant du vin, c'est des moments un peu magiques, un peu émouvants. Et les descriptions pleines de superlatifs à l'américaine, ca fait rêver. C'est un peu paradoxal, j'en conviens. Je sais que si je parle avec émotion d'un vin à certains amis, ils se précipiteront pour en acheter, plus que si je déballe une liste d'épicerie de sensations. Je suis pas encore tout à fait certain de la conclusion de ce raisonnement....

Mais procédons, on s'enlise dans les questionnements.

Je me propose donc de vous faire des suggestions pour accompagner vos plats typiques du temps des fêtes. Et à l'instar de certains critiques, je ferai quelque chose d'incroyablement courageux: Je vais me commettre en osant déclarer que certains vins sont bons.

-Avec la dinde chèsse, surtout si vous avez des canneberges en cannes, évitez les vins rouges achèssants, optez pour la bourgogne. Et question d'éliminer le risque, voici une suggestion: Optez pour la romanée 2006 du comte Liger-Bélair, à 800$, et allez en paix: Je vous garantie que c'est bon dans le verre, et que ça coule la dinde avec brio. Vous voilà soulagé, .

-Avec le vol-au-vent au poulet, Optez pour un grand bordeaux blanc. Il y a d'ailleurs du Haut-Brion blanc de dispo. Aucun risque de ce côté, c'est que du bon. Un 600$ bien investi.

- Avec le "ptit pain gumbo", particulièrement si vous utilisez beaucoup de céleri, et un boeuf haché assez relevé vous apprécierez le caractère noblement végétal d'un vieux bordeaux. Foncez pour cos d'Estournel 1985, je vous le confirme, vous pouvez acheter les yeux fermés. Ça le fait grave. Ne me remerciez pas, j'suis comme ça, le coeur sur la main quand vient le temps de défendre les intérêts du consommateur en goûtant des grands vins.

Ce qui m'amène à deux constatations sur la critique en guise de conclusion:

-Faire des accords réussis avec des grands vins, c'est pas très difficile. Faire des accords intéressants avec des vins accessibles, ca prend un peu plus de discernement. J'ai pas de misère à croire qu'un steak avec un haut-brion, c'est sympathique.

-C'est pas particulièrement compromettant de déclarer qu'un solaia de 250$ est bon. Y'a des bonnes chances que ce soit pas mal. C'est défoncer des portes grandes ouvertes... Dire qu'un vin de 14$ est grand, c'est autre chose. Ça prend un peu plus de courage...

En terminant, alors que plusieurs personnes voient dans l'achat d'un vin un risque, celui de tomber sur un vin qui leur plaît pas, moi j'y vois plutôt une opportunité. Celle de faire l'expérience de sensations nouvelle, de découvrir un vin ayant un profil original, une personnalité affirmée. Worst case scenario, c'est pas très bon, et on passe à un prochain appel.

Alors, osez vivre dangereusement!

Joyeuses fêtes, et faites exploser les commentaires avec ce que vous avez dégusté en cette période de célébrations!

5 commentaires:

  1. merci pour les choix de mets : ''ataka'' en canne et vol-au-vent :)

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  2. Un bon champagne Castelnau 2000... Ça goutait la fête...! J'ai hâte à celle du jour de l'an! Et après quelques commentaires sur le Haut-Brion, tu commences à me tenter...

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  3. C'est tellement bon de la bulle... Et pour le Haut-brion, disons que je m'en sers plus comme symbole, ca coute cher. Tu peux trouver des trucs supers pour une fraction du prix!

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  4. Ne t'inquiète pas! Je vais devoir changer d'orientation de toute façon, si je désire me payer ce petit bonheur! Et... comme tu le dis si bien... j'aime beaucoup trop vivre dangereusement! Ce n'est que la tentation qui parle! Un Riserva Gattinara 2004 assouvira probalement cette tentation... (bien que ce ne soit pas bien dangereux...) ;)

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